samedi 7 juin 2008

Les concombres de la discorde !

Je viens d'acheter 3 sachets de graines de concombre chez Biaugerme : Rollinson's Telegraph, Marketer, ..... et ........ Blanc long parisien, le seul qui ait un vrai nom - digne de ce nom justement. Mais voilà, cette dernière variété est, et cela est spécifiquement indiqué, réservée pour un usage amateur. Seul le jardinier, dans son potager privé à donc le droit de cultiver et de manger cette variété de concombre à la peau blanche et à la chair douce.... Je me place donc d'emblée dans l'illégalité en commercialisant une variété qui n'est pas inscrite au catalogue officiel.
Je suis allé faire un tour sur le site du Groupement National Interprofessionnel des Semences et plants joliment dénommé Gnis, c'est-à-dire un lobby composé des multinationales de l'industrie semencière chargé de répertorier les variétés de semences et de distribuer les autorisations de commercialisation moyennant finance. Le GNIS participe égalament au BRG (sic), c'est-à-dire le bureau des ressources génétiques (dont la devise est, il faut le souligner : "les ressources génétiques, un patrimoine vivant façonné par l'homme, un capital à préserver pour les générations futures". Il y en a qui doute de rien !). Intrigué, je poursuis mes recherche avec mon ami google, et il m'emmène voir la Chargée de mission au bureau de la sélection végétale et des semences du Ministère de l’Agriculture et de la Pêche (DPE), Mme Clément-Nissou, celle-là même qui représente le GNIS au BRG (vous me suivez....) et qui travaille avec la FAO à la commission des ressources génétiques pour l'alimentation et l'agriculture... et qui donne des conférences sur "Les enjeux de la propriété industrielle dans les biotechnologies" à l'université de Paris 13....
Bref, moi, avec mes concombres je suis bien embêté. Et je m'interroge : Avez-vous le droit de manger des concombres Blancs longs parisiens, même si vous n'êtes pas jardiniers amateurs, ou êtes vous contraints d'acheter les seules variétés hybrides créées par les agrosemenciers ?
Revenons sur le site du GNIS sur lequel on lire que, par exemple, la variété Breso dont les droits sont détenus par Vilmorin Sa. est bien inscrite au catalogue national potagère (liste A) mais que, et là je suis désappointé, la variété Blanc long parisien est, quant à elle, inscrite sur la liste des variétés pour amateurs, et donc exclue du circuit commercial parce qu'aucune firme, multinationale, ne s'est appropriée les droits pour la commercialiser..... Il s'agit donc bien d'une question de gros sous et de rien d'autre. Le premier qui décide de payer pour inscrire une variété au catalogue national, comme la Breso, détient donc le droit de commercialiser cette semence et en devient le propriétaire. Et c'est là où la génétique entre en jeu, car il faut déterminer un code génétique précis pour déterminer une variété et fixer les droits de propriété. Nous sommes au coeur d'enjeux considérables tant sur le plan écologique, humain et éthique, que sur le plan économique, politique et géostratégique. Nourrir le monde, et surtout les peuples de ce qu'on a appelé le Tiers-monde, ce n'est pas cela qui importe ! La question est de savoir qui va les nourrir ! Qui va remporter le marché pour vendre la nourriture, les semences de blé, de riz, de maïs, de soja, à tous ces affamés ! Nous parlons de milliards d'euros. Les guerres du futures se dessinent aujourd'hui. Le débat autour des ogm s'inscrit de plein pied dans cette perspective. Le paysan doit, et devra d'autant plus à l'avenir, racheter chaque année ses semences car celles-ci sont stériles et perdent leurs caractéristiques si l'on récolte les graines et qu'on les resème l'année suivante. Ainsi les paysans et les populations deviennent dépendants de quelques firmes agro-semencières. Et c'est pour cela qu'on investi à tout va dans la recherche génétique pour rester en course et arrivée en bonne position pour contrôler le marché international de l'alimentation. Ce qui est en train de se passer c'est que l'on achète un chou ou une laitue comme on achète un tableau, un disque ou un dvd, on achète le droit de le consommer. Ce que l'on mange, même s'il est reproductible, est soumis au droit de la propriété industrielle. Bref le fameux patrimoine génétique et la biodiversité tombe dans le domaine privé et sous le coup de la loi alors que, vous m'excuserez, les choux et les salades étaient là bien avant que l'homme décide de les sélectionner, de modifier leur caractéristique par l'hybridation et maintenant de les transformer génétiquement. On ne créé par une variété hybride ou transgénique de salade comme un artiste crée une oeuvre d'art !
Et le GNIS dans tout ça ? Il protège la biodiversité nous dit-il. Allez donc faire un tour sur leur site d'info sur lequel on peut lire quelques articles sur la biodiversité, l'affaire kokopelli, les ogm... On y apprend avec enthousiasme que les exportations de semences s'envole et que ça rapporte gros, "avec un excédent de 365 millions d’euros, soit 15 % de plus que l’année dernière, la balance commerciale du secteur des semences n’a jamais été aussi bonne. Elle représente 18 % de l’excédent commercial français des produits agricoles". C'est pas comme le pouvoir d'achat des Français. Bref, tout cela est bien juteux ! Mais ça ne me donne pas la possibilité de cultiver mon Blanc Long Parisien. Il avait l'air pourtant fameux ce concombre !

Pour compléter : Alimentation : la FAO dénonce la responsabilité des pays développés

1 commentaire:

Dominique a dit…

Dans le declaration de l'haricot biomagique au Journal officiel ya marqué
"organiser des actions...par divers moyens tels que des ateliers pédagogiques de jardinage sur les exploitations"
Donc c'est bon, on est tous un peu jardinier amateurs non ?
En tout cas c'est bien lamentable tout ça, vivement qu'ils soient dans notre assiette ces concombres !
Dominique